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Humour, chanson, poésie et… rando ! le 25 janvier 2015

Le 01/02/2015

Dans Randos du jeudi

Humour, chanson, poésie et… rando !

  Programme rando RSP 1er semestre 2015 : week-end du 24 et 25 janvier, petite marche proposée par Patricia. Avec cette animatrice tout est possible ! On peut très bien partir en petite foulée sur 42 kms ou pédaler sur 120 kms et finir par une petite baignade de 6 kms, le tout dans la bonne humeur. Mais au programme rien de tout cela, une simple balade en forêt, la nuit, en hiver, 54 kms… sans dénivelé… ouf ! on respire, c’aurait pu être pire !

Je m’inscris, je n’avais rien de programmé. Nous sommes quatre à tenter l’aventure. Sheila est au rendez-vous,  c’est l’heure de la sortie :

On forme un groupe…

Un petit groupe…

D’amis fidèles qui…

Ce refrain me vient en tête quand l’animatrice, en gare de Franconville à 21 h 30, ce samedi 24 janvier, nous donne notre carte d’inscription, groupe 501 ! Le chef de gare, qui serait mieux chez lui à cette heure tardive auprès de sa femme, paraît tout étonné par notre accoutrement : bâtons, sac à dos, lampe frontale, nous, les randonneurs d’un soir, les nyctalopes du Plessis !

Nous ne sommes pas seuls, deux congénères nous rejoignent sur le quai, direction Versailles, point de rencontre pour un départ donné à minuit sur l’esplanade du Château. Il trône notre Louis le Quatorzième sur la selle de son cheval, son accueil est plutôt cavalier. Il aurait pu illuminer de tout son soleil la splendide façade de sa belle demeure – que nenni ! Il faut dire que nous lui faisons un peu d’ombre, nous sommes 1 876 à nous élancer pour cette 80e marche Versailles-Mantes à minuit tapante. Cette marée humaine est lâchée par vagues successives, l’aventure commence. J’essaie de calmer un peu mon angoisse, quelques jeux de mots me viennent à l’esprit sur le randonneur Versaillais, du style : « À Versailles, nous maintenons le rythme et la chaussure que nous préférons, c’est la pompe Adour ! »

Rien à faire, l’angoisse me noue l’estomac… La chanson reprend ses droits, mais je marche, j’avance :

J’ai la rate qui s’dilate

J’ai le foie qu’est pas droit

J’ai le ventre qui se rentre…

Ah !  bon dieu qu’c’est embêtant…

Déjà quelques pas en moins, il ne m’en reste plus que 72 203 à faire ! Nous traversons Versailles, Rocquencourt, la forêt de Marly. Deux éminentes randonneuses du club sont déjà en tête du troupeau, parties sur un rythme élevé, véritables chèvres de Monsieur Seguin, éprises de liberté... Patricia m’accompagne. Elle a décidé de m’emmener à une cadence de 5 km/h de moyenne. Le but est d’arriver avant 11 heures du matin, fermeture du guichet de contrôle, et de recevoir la médaille du souvenir, décoration du fantassin d’une nuit. Premier contrôle à 2 h 30. Nous attaquons alors le plateau des Alluets. Sur ce plateau, nous rejoindrons les concurrents des 39 kms (440 partants). La température est négative, le sac à dos givre, je chantonne :

Alluette, gentille Alluette,

Alluette, je te plumerai…

C’est le pied que je plume en premier, ma tête imperceptiblement se baisse à chaque enjambée pour regarder le bout de mes souliers.

Moi, mes souliers ont beaucoup voyagé...

Mon coach s’en aperçoit et de suite ne me laisse pas gamberger dans des pensées négatives. Elle connaît ce passage à vide, ce trou noir du randonneur du 27e km qui frappe sur cette interminable ligne droite. Elle me secoue pour relever la tête et regarder la voûte céleste. Elle est au rendez-vous, brillante de mille feux, principalement Orion et son baudrier, cette belle constellation d’hiver de notre hémisphère Nord. Les trous noirs, c’est pour les étoiles… Pas pour moi, je repars sur une bonne cadence. Sur la route, je m’aperçois de l’omniprésence de petits hommes en combinaison beige, portant leur croix rouge sur la poitrine 1, qui nous observent et interviennent si nécessaire. Nous sommes en sécurité. Déjà, les premiers estropiés de la godasse font leur apparition. Il me semble comme le père de Victor Hugo notre grand poète,

 Après la bataille 2

entendre dans l’ombre du plateau les râles d’un fantassin affalé sur le bord de la route, et qui disait: « A LED, à LED, j’ai une ampoule ! »

Un secouriste, ému, parcourant ce champ de bataille, sur qui tombait la nuit, tendit à ce pauvre marcheur blessé, un Tricosteril qui pendait à sa ceinture, en lui disant : « Tiens, soulage ta souffrance ! » Petit délire poétique du premier coup de pompe, mais mon remède, c’est le coup de barre aux noisettes et au chocolat. Des kilos joules en perspective et me voilà reparti :

Un kilomètre à pied, ça use, ça use,

Un kilomètre à pied, ça use les souliers…

Rengaine de colonie de vacances au km 32. Nous sommes à Maule, il est 6 heures, le jour n’est pas encore annoncé, mais les concurrents des 22 km (621 partants) s’élancent à leur tour et nous doublent d’un bon pas. Patricia ne faiblit pas, elle assure. C’est réconfortant, elle m’entraîne, me stimule, sa compagnie est rassurante et tonifiante. « C’est loin Mantes ? – Tais-toi et marche ! » Le jour se lève vers Boinville, soudain l’horizon s’éclaire, c’est magnifique. La campagne couverte de givre apparaît dans la lumière blafarde du petit matin. C’est l’heure où le coq chante et le chien aboie. Hugo reprend du service :

Demain, dès l’aube

Ô Mantes, la religieuse qui nous offre au loin une belle perspective sur sa collégiale.

La météo est clémente et même ensoleillée – que du bonheur ! Comme un couple de  perruches dites inséparables, nous survolons Jumeauville, petite commune du départ de la marche familiale, il nous reste une petite douzaine de kilomètres (222 partants) et nous voilà déjà dans les faubourgs de cette jolie ville de Mantes, ou plutôt de cette belle ville de Mantes-la-Jolie. Et c’est le gymnase d’arrivée ! Dix heures et demie de marche, objectif atteint. J’attends la décoration quand ma tête se met à tourner. Je m’assois, m’allonge dans l’herbe sur le bas coté. Après une nuit passée avec Patricia, me voilà dans les bras d’une belle et jeune secouriste qui me propose une boisson fraîche. Je commande une menthe à l’eau mais je comprends que l’ambiance n’est pas tout à fait à l’humour. Je suis en déshydratation, il faut compenser cette perte d’eau.

Allo maman bobo…

 Mais déjà, mon copain Collins, me file son refrain à l’oreille :

One more night, one more night…

Et c’est vrai, déjà, on en redemande. Un grand merci à Patricia. À Jacques, notre chauffeur. Nous avons tous fini la rando ! Et que l’équipe 501 s’étoffe l’année prochaine, ça vaut vraiment le coup !

 

 

[1] En cas d’urgence Croix-Rouge, contactez le 01.30.83.95.65.

[2] Voir annexe.

[3] Voir annexe.

René

One more night de Phil Collins (vidéo)

ANNEXES

Après la bataille

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
C’était un Espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
Et qui disait: « A boire ! à boire par pitié ! »
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit : « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. »
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : « Caramba ! »
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
« Donne-lui tout de même à boire », dit mon père.

Victor Hugo

 

Demain, dès l’aube...

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Victor Hugo